FauTe de FraPpe


Lundi 26 avril 2010, 18 h

 

Ma chère Rhanna,

Il n’y a que toi à qui je peux me confier. Nous ne nous connaissons pas physiquement, hormis quelques clichés ratés que tu as mis sur le profil de ton blog, et que je soupçonne de n’être pas vraiment toi. Mais qu’importe, tu es celle avec laquelle je me sens bien. Peut-être et vraisemblablement, parce que nous ne savons pas grand-chose l’une de l’autre.  Je veux parler des renseignements courants que chacun et chacune est en droit de connaitre habituellement d’une personne avec qui elle correspond tous les jours, et même parfois plusieurs fois par jour.

J’aime à imaginer que tu es plus âgée que moi, car je sens à travers tes mots, une certaine maturité du moins une expérience et un vécu. Tu sais écouter, et Dieu sait si j’ai besoin qu’on m’écoute…

Aujourd’hui, c’était mon premier jour de travail dans ce magasin de chaussures dont je t’ai parlé. C’est tout nouveau pour moi, mais tellement agréable de me dire que j’ai un travail, que je passe sur le fait que ma patronne est souvent sur mon dos. Une de mes collègues me regarde un peu de travers, elle doit croire que je vais lui voler sa place ou ses clientes, mais qu’importe…

Oh bien sûr, il s’agit d’un remplacement de trois mois, mais je suis tellement contente de me lever tous les matins avec un but. Jean-Pascal a un peu tiqué quand je lui ai annoncé que j’avais décroché ce boulot. Il dit que je vais perdre mes ASSEDIC pour rien et qu’il va falloir que je refasse le dossier ensuite. Mais je m’en fiche …

Je crois qu’il n’est pas content, parce qu’il va falloir qu’il garde la petite toute la journée. Il n’a pas l’habitude et surtout  il ne pourra pas aller jouer aux cartes avec ses copains aussi facilement qu’avant. Moi je me dis qu’il dépensera moins d’argent dans son bar et que c’est toujours ça de gagné. Enfin on verra bien …

Et puis, on va pouvoir partir 8 jours en vacances. J’ai décidé ça toute seule dans mon coin, et çà me fait bizarre de me dire que çà sera grâce à mon argent. J’espère seulement que Jean-Pascal sera d’accord. Comme je te l’ai dit, il ; n’est pas toujours très facile à vivre, mais je l’aime.

Je t’embrasse

Angèle

 

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Lundi  26 avril, 23h30,

Juste un petit coucou avant d’aller me coucher. J’ai eu du mal à endormir la petite, mais c’est bon maintenant.

Jean-Pascal n’est pas encore rentré. Il doit faire la tête…

A demain

Angèle

 

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Mercredi 28 avril 12h30

 

Ma chère Rhanna,

Pas pu t’écrire hier. JP est rentré dans la nuit de lundi hyper tard (ou hyper tôt comme tu veux) il avait un peu bu et il a fait tellement de bruit en rentrant qu’Isabella s’est réveillée. J’ai eu toutes les peines du monde à la recoucher, car elle entendait son père parler fort.

On a fini par se rendormir mais la journée a été difficile.

 

Ce matin, il faisait beau quand je suis partie de la maison. J’avais mis un petit tailleur de printemps, bleu marine. Tu sais les basiques indémodables que toutes les femmes devraient avoir dans leur armoire. J’avais mis des chaussures à talons un peu hauts et Jean-Pascal m’a fait une réflexion quand je suis sortie. Sois-disant que je m’habille mieux depuis que je travaille, et que je me maquille.

Je ne peux pas dire qu’il ait tort. Enfin je respire et j’ai l’impression de revivre !

Donc, je te disais que j’avais mis ces jolies chaussures qui s’ennuyaient depuis si longtemps dans mon placard.  Cà m’apprendra à faire la coquette, car au bout de 2 heures à piétiner dans les rayons du magasin, j’avais déjà des ampoules et bien sûr personne ne pouvait me dépanner d’un pansement.

J’en ai donc été réduite à emprunter une paire de ballerines à ma patronne.

J’avais beaucoup moins fière allure, mais c’était quand même plus confortable …

Rien à dire sur le reste de la journée. ..  Si, ce n’est quand même pas facile de travailler toute la journée et de devoir s’occuper de la maison en rentrant…

Angèle la coquette

 

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Jeudi 29 avril

 

Jean-Pascal m’a encore fait une scène ce soir. Tout çà parce que j’ai fait trop cuire le rôti. Je ne peux pas dire le contraire, mais j’étais en train de baigner la petite et quand j’ai senti l’odeur, c’était trop tard.

 

J’ai fait mon mea culpa, un bisou dans le cou et je me suis arrangée pour le câliner sur l’oreiller. De toute façon, il ne sait pas s’endormir sans çà, mais j’y ai mis un peu plus d’entrain que d’habitude…

Je ne devrais pas dire çà, je sais, mais c’est facile de me confier à toi, je sais que personne d’autre ne le saura (en tout cas que je connais)

Et puis les pseudos, çà a du bon n’est-ce pas ? Quand je pense que si cela se trouve, on habite dans la même ville, incroyable non ?

@]+

Angèle

 

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Vendredi 30 avril 21h

 

Ouf, la semaine est finie et Isabella dort. Jean-Pascal vient de partir jouer aux cartes chez ses copains de l’immeuble d’à côté. Il voudrait bien qu’on vienne avec lui, mais je n’ai pas envie de passer la soirée à respirer la fumée de leurs cigarettes et de faire semblant de rire de leurs blagues vaseuses.

Comme Isabella est petite et qu’elle a du mal à dormir, çà arrange tout le monde. Elle ne leur plombe pas la soirée avec ses pleurs et moi je peux rester à la maison et t’écrire.

J’ai rangé mon placard et essayé de tirer le meilleur parti de mes affaires vieillissantes. J’aurais voulu que tu sois là, je suis sûre qu’on aurait ri comme des folles.  J’ai fait des essayages, mis les accessoires qui conviennent afin de donner un coup de peps à mes habits un peu démodés.

Tu vois, c’est un métier qui m’aurait plus, la mode. Mais mes parents n’auraient pas eu les moyens de me payer l’école qui va bien.

Je ne sais pas pourquoi je dis cela, puisque mon père était contre les études trop longues. IL disait que çà ne servait à rien de donner des idées aux filles car leur place était à la maison. Et comme maman ne voulait pas le contrarier…

 

Enfin bref, je ne regrette pas. J’ai rencontré Jean Pascal à 16 ans et depuis on ne s’est plus quitté.

Je ne t’ai jamais raconté comment on s’était connus ?

Demain, car ce soir je suis fatiguée. Et puis parle-moi un peu de toi, sinon je ne te dis plus rien

Bonne nuit

Angèle

 

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Dimanche 2 mai

 

Il est 7 heures du mat et tout le monde dort encore. Quel plaisir d’avoir la maison à moi toute seule. J’ai fait du café, fait griller des toasts et je me suis installée dans le canapé en tailleur avec ma tasse de café noir et mes tartines beurrées. Le pied ! Même pas envie d’allumer la télé. J’ai savouré le silence de la maison, entrecoupé des « scronch scronch » du pain grillé dans ma bouche.

On a beau dire, mais rien ne remplace le calme d’une maison remplie de gens qui dorment… J’adore !

Après je suis montée à l’étage, et je regardé ma boite mail chérie. C’est fou comme on s’habitue par ne plus fonctionner qu’avec l’informatique. Dis-moi comment on faisait avant ?

Chouette !  il y avait un message de toi. Bon, il faut reconnaître que tu es moins bavarde que moi, mais ce n’est pas grave, j’adore te lire car tu es toujours de bon conseil. J’ai l’impression qu’il est arrivé quelque chose dans ta vie qui t’a rendue distante et à la fois proche. Cela peut paraître contradictoire, mais c’est vraiment ce que je perçois.  Tu ne te racontes pas ou peu, et en même temps, tu es présente dès que mes doutes ou mes interrogations me poussent à te parler sur le net.

Tu dois être la grande prêtresse Rhanna, oui cela te va bien.

Angèle

 

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Dimanche 2 mai, 11h

 

Je ne sais pas comment il fait, mais il dort encore. C’est vrai qu’il est encore rentré à pas d’heure et qu’il sentait l’alcool à plein nez. J’ai fait semblant de dormir, surtout quand après s’être affalé bruyamment dans le lit, il a commencé à se coller contre mes fesses.

J’avais pas envie comme çà…

Çà fait 5 ans qu’on est ensemble… Bon allez je te raconte, et puis cela te sera utile si tu veux me connaître un peu mieux.

 

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Samedi 8 mai 

 

Pas pu t’écrire de toute la semaine. Je me tapée une gastro et ensuite cela a fait le tour de toute la famille. Génial !

Bon je t’avais promis de te raconter le début de notre histoire à JP et moi, alors chose promise chose due, je me lance. En plus j’ai tout mon temps, c’est férié aujourd’hui. Il faut juste que je ne sois pas sur l’ordinateur quand JP se lève, il dit que j’ai autre chose à faire et que l’ordinateur c’est pour les intellos. Qu’est-ce qu’il en sait ?

 

Donc voilà ! J’étais sortie en boite, en cachette car j’avais juste 16 ans et mes parents n’étaient pas d’accord. Alors j’ai raconté que j’étais invitée à une soirée pyjama chez ma copine Léa. Bon je sais, ce n’est pas cool de mentir, mais parfois la fin justifie les moyens comme on dit.

On avait passé une super soirée, on s’était fait draguer par des types plus âgés que nous. On n’était pas peu fières et faut avouer qu’on avait un peu bu. Un des types lui n’avait pas fait que boire et il était un peu trop collant à mon goût…

 

Donc 3 heures du mat, on se dit au revoir. Le temps de prendre nos blousons au vestiaire et nous voilà dehors. C’est là que les choses se sont gâtées. Deux des garçons, bien allumés, ont commencé à nous suivre et à nous coller d’un peu trop près.  Ils ont voulu nous forcer à les embrasser. Berk, ils sentaient l’alcool à plein nez ! Çà commençait à être sacrément chaud, quand le videur de la boite a arraché littéralement le mec qui me pelotait et l’a envoyé dans le décor.  « Tu la laisses tranquille ! «  il a dit.  Après que l’autre se soit tiré, il s’est présenté : « je m’appelle Jean-Pascal et toi ? »

Et voilà banal et à la fois romantique… La semaine suivante, on s’est donné rendez-vous, et ensuite on ne s’est plus quitté.

 

Bon d’accord, avec le temps, ce n’est plus tout à fait comme avant. Il est moins tendre, mais je l’aime quand même tu sais, enfin je crois. C’est juste qu’à force de côtoyer ses copains du quartier, il boit de plus en plus lui aussi. Et l’alcool et l’amour n’ont jamais fait bon ménage. Il dit tout le temps qu’il peut arrêter quand il veut. Je demande à voir. J’aimerais bien retrouver le JP du début, parce que celui qui vit avec moi, il est un peu trop brutal… Mais bon ce n’est pas de sa faute, c’est à cause de l’alcool. Quand il arrêtera, cela ira mieux et tout redeviendra comme avant. Enfin, j’espère…

Qu’est-ce que tu en penses, toi ?

 

J’entends du bruit dans la chambre, il est en train de se lever, il faut que je lui fasse son café.

A plus tard ma belle

Angèle

 

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Mardi 1er juin

 

Presque 3 semaines sans t’écrire… j’en avais tellement besoin pourtant… mais je ne pouvais pas car j’ai eu un petit accident qui m’a obligé à rester à l’hôpital pendant quelques jours. C’est maman qui a gardé Isabella.

Ensuite, quelques jours de repos chez mes parents et me voilà de retour à la maison.

Çà me fait bizarre, ce doit être normal non ? Quand on passe du temps dans sa chambre de jeune fille, on se rappelle ses rêves de l’époque, comment on voyait son avenir.  Allons bon, voilà que je deviens nostalgique, stop !

Et puis arrêtons de parler toujours de moi, j’ai besoin d’en savoir un peu plus sur toi, s’il te plait, quelques mots !

Promis ?

Ta petite Angèle

 

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Mercredi 2 juin

 

Merci de tes confidences Rhanna. Je savais qu’il était arrivé quelque chose de spécial dans ta vie, pour que tu sois à l’écoute des autres à ce point. Tu me dis que c’est moi qui te fais du bien et que je ne suis pas toutes les autres. J’en suis extrêmement flattée et je mesure l’effort qu’il t’a fallu pour te confier à moi.

Moi , mon père a toujours été relativement sympa. Sévère, un peu « vieille France » mais çà allait.

Rien à voir avec ce que tu as vécu. Mais comme tu dis, il faut aller de l’avant, faute de pouvoir oublier ni pardonner.

J’ai besoin de ton amitié, Rhanna. Même virtuelle, je là sens bien réelle et elle me fait beaucoup de bien.

Je t’embrasse, compagne d’infortune

Angèle

 

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Lundi 14 juin.

 

Chère Rhanna

Il m’a frappé. C’est la deuxième fois.

 Je ne sais pas quoi faire, et à la fois j’ai honte. J’ai honte et j’ai peur…

Je ne te l’ai pas dit la première fois, car j’étais sûre que cela n’arriverait plus. C’était pas vraiment de sa faute, toujours l’alcool qui lui fait dire n’importe quoi et le rend méchant. Et puis, quand je suis sortie de l’hôpital, il m’avait promis qu’il arrêterait de boire. Il pleurait de me voir souffrir à cause de mes côtes cassées et Il avait l’air tellement sincère…

 

Je l’ai cru, Rhanna. C’est normal, non ? C’est comme çà quand on vit avec quelqu’un, on lui fait confiance, non ? On n’a pas peur de lui ? Je ne sais plus, je suis perdue et j’ai mal.

 

En plus, il m’a frappée pour rien. J’ai eu le malheur de changer de chaine pendant qu’il regardait son match. Çà l’a mis en fureur. J’ai eu tort de lui tenir tête et il m’a frappée la tête avec sa canette de bière. Il y avait du sang partout.

 

Et il s’est excusé. Et il s’est encore excusé…

Tu crois qu’il va recommencer ?

J’attends tes conseils avec angoisse

Angèle

 

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Samedi 19 juin

 

Très chère Rhanna,

Je me suis angoissée pour rien. Cela va beaucoup mieux. Depuis lundi, il est aux petits soins.

Finalement j’avais raison, c’est l’alcool qui est en cause, car i l m’a promis qu’il ne boirait plus et depuis le début de la semaine, il a tenu parole.

Oui je sais, tu m’as dit qu’il ne fallait pas le croire, qu’ils disent tous cela et qu’ils recommencent toujours. Mais Jean-Pascal n’est pas comme cela, j’en suis sûre.

Depuis lundi, il fait à manger et s’occupe de la petite. Bon d’accord, purée/jambon, des trucs comme çà, mais tu ne peux pas te rendre compte de ce que cela représente pour moi.

C’est super important, cela veut dire que je compte encore pour lui et qu’il regrette.

Moi je suis certaine qu’il est sur la bonne voie, quoi que tu en dises !

Mais réponds-moi quand même Rhanna, çà illumine mes journées… parce que la télé çà va un peu.

Angèle

 

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Dimanche 20 juin

 

Télé toute la journée. Matchs de foot et séries policières.

Et deux copains qui sont venus jouer aux cartes à la maison. La maison empeste le tabac…

J’en ai assez, j’ai envie de découvrir d’autres horizons.

Demain, je dois téléphoner à ma patronne du magasin de chaussures, pour voir si je peux reprendre le boulot. Cà me changerait les idées.

Bisous ma Rhanna !

Angèle

 

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Mardi 22 juin

 

Zut et zut !  La patronne n’a pas renouvelé mon CDD. Soi-disant que pendant mon absence, il y a eu moins de travail. J’ai fait semblant d’y croire, mais une de mes anciennes collègues est passée me voir ce matin.

Elle m’a raconté que la patronne avait entendu dire que je m’étais battue avec une voisine. Tu te rends compte ! Elle a cru que c’était moi qui étais violente. Cà me rend folle qu’elle puisse penser cela de moi. Qui a pu lui raconter cela ?

Bon allez, positivons ! C’est l’occasion de faire autre chose. Je crois que je vais t’écouter et faire un bilan de compétences. Cela va peut-être me donner l’impression que je suis bonne à quelque chose…

Le hic, c’est qu’il faut que j’en parle à JP.

Je t’avoue que j’ai un peu la trouille, mais je me dis que s’il m’aime, il va au contraire m’encourager.

Je me lance dans la semaine, je te raconterai.

Bonne nuit Rhanna, fais de beaux rêves…

Angèle

 

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Samedi 26 juin

 

Pourquoi il ne me fait pas confiance ? Pourquoi dis-moi Rhanna ?

Quand je lui expliqué ce que j’avais envie de faire, il a éclaté de rire. Il m’a même craché sa gorgée de bière à la figure, tu te rends compte !

Moi je n’en reviens pas de sa réaction. J’ai insisté et c’est à partir de ce moment là que les choses se sont gâtées. Le ton a changé, il a fini par me crier dessus et m’a interdit de faire ce bilan de compétences.

« Ma pauvre fille, tu ne vois pas plus loin que le bout de ton nez ? Il a dit. Mais pour qui te prends-tu, une intellectuelle ?

J’ai pleuré, çà l’a énervé et il m’a secoué comme un prunier. Je me suis cogné la tête contre le meuble de la salle à manger.

Il m’a tellement fait peur que je me suis réfugiée dans la chambre avec la petite.

J’ai entendu le bruit de la porte de frigo qui s’ouvrait et d’une canette qu’on débouchait.

Du coup, on s’est couchées sans manger, Isabella et moi, mais apparemment il s’en fichait…

Et si tu avais raison ? Qu’est ce que je dois faire ?

Je sais déjà que tu vas me répondre de penser à ma fille et à moi et d’assurer notre avenir, et je sais que tu as raison.

Je le ferai, ce bilan de compétence, qu’il soit d’accord ou pas !

Tu es ma meilleure amie

Angèle

 

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Dimanche 27 juin

 

Ma chère Rhanna

Hier soir j’ai attendu qu’il s’endorme en ronflant devant la télé, puis j’ai fait un biberon à Isabella. Tu verrais comme elle est belle ma fille ! De grands yeux bleus et une bouche en cœur, je ne me lasse pas de la regarder. Je me dis que sans elle, je n’aurais plus goût à la vie.

Je sais qu’il ne faut pas dire çà parce qu’à mon âge, on a toute la vie devant soi.

Mais quelle vie ? Je me rends bien compte que celle que je vis depuis plusieurs semaines ne me convient plus. Quoi faire ? Je n’ai même plus de travail.

J’ai envie malgré tout d’en parler à Jean Pascal et de lui faire comprendre que cela ne peut plus continuer comme çà.

Demain soir peut-être. Je ferai un bon repas et on parlera tous les deux.

C’est une bonne idée, dis-moi que oui, c’est ce que je veux entendre, alors dis-le moi !

Avec toute ma tendresse

Angèle

 

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Dimanche 27 juin 22 h

 

Réponds-moi nom d’un chien !  J’ai besoin d’encouragements, ce n’est pas compliqué pourtant !

Une Angèle en colère

 

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Jeudi 1er juillet

 

Pardon, pardon Rhanna ! Je ne sais pas ce qui m’a pris de t’écrire çà. Je n’en peux plus, il faut que tu m’aides à y voir clair…

Merci d’être toujours là pour moi.

Ton Angèle

 

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Vendredi 2 juillet

 

Ma chère Rhanna

Je viens de vivre le pire soir de ma vie.  J’avais préparé un bon dîner avec la ferme intention de parler à JP. Il est rentré du travail un peu énervé, en grognant après « ces faignants de patrons qui ne pensent qu’a se faire du pognon sur le dos des ouvriers » çà commençait mal.

Quand je lui ai proposé un verre, il n’a pas dit non bien sûr. Il m’a juste demandé : « qu’est ce que çà cache ? »

Alors je me suis lancée. Je lui ai dit que cela ne pouvait pas durer ainsi, qu’il buvait trop et qu’il devenait violent. J’ai ajouté que je ne pourrais pas continuer à vivre avec lui s’il ne faisait pas des efforts…Je lui ai parlé de désintoxication comme tu m’avais dit.

Je n’ai pas eu le temps de finir ma phrase. Il m’a arraché Isabella des bras et l’a jetée sur le canapé. Elle s’est mise à pleurer immédiatement et il s’est mis à lui crier dessus et à la secouer. J’ai essayé de l’en empêcher et il m’a tordu le bras.

J’ai crié de toutes mes forces jusqu’à ce que le voisin de pallier sonne à la parle en nous menaçant d’appeler les flics…

Çà a calmé JP immédiatement. Il nous a enfermé dans la chambre et a allumé la télé.

C’était l’heure de télé foot…

 

S’il recommence à s’en prendre à ma fille c’est moi qui vais devenir violente …j’en ai plus qu’assez !

Mais je suis malheureuse tu sais…

Angèle

 

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Samedi 3 juillet

 

Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit.

J’ai bien réfléchi, çà ne peut plus durer. Il faut que je fasse quelque chose pour nous sauver, Isabella et moi…

J’ai peur de moi à présent …

 

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Dimanche 4 juillet, 9h

 

Aujourd’hui c’est la fête de l’indépendance.

Ce soir on partira…

Je suis sûre que tu sera fière de moi

 

Angèle ex peureuse, ex pleureuse

Angèle la nouvelle, Angèle la combattive

 

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Dimanche 4 juillet 21h

 

Rhanna, mon amie, ma sœur,

Çà y est on est libre. Isabella ne craint plus rien. Je l’ai sauvé de ses griffes.

 

Il y a du sang partout.  J’en ai plein sur les mains.

C’est chaud et çà colle et maintenant j’en mets sur les touches du clavier…

Je n’avais jamais remarqué que çà changeait si vite de couleur, le sang. Au début si rouge, quand il gicle en jets puissants. Et puis ensuite la flaque se met à brunir jusqu’à devenir noire.

Et cette odeur douceâtre qui monte au nez….

 

JP est assis sans bouger le long du mur. Pour une fois, il est calmé. Il nous regarde d’un air étonné et çà lui va plutôt bien. Il a juste ce drôle de manche qui sort de son cou.

Sa canette de bière a roulé par terre sur la moquette. Ç à va faire des tâches…

 

C’est sa faute aussi, il était prévenu, fallait pas s’en prendre à la petite.

 

C’est terminé Rhanna., Je t’écris une dernière fois, pour te dire que c’est grâce à toi tout çà. Tu m’as donné la force de dire non. Je sais que toi tu me comprends, mais les autres ils me donneront tort, forcément …

 

J’ai mal à la tête…

J’entends des sirènes au loin.

Il y a aussi des cris dans ma tête

J’ai chaud…

Je vais ouvrir la fenêtre …

 

Il doit faire bon dehors…

Il va faire bon en bas…

 

S’envoler pour oublier…

J’ai mal à la tête…

 

Je m’appelle Angèle , Angèle la liberté

et je t’aime…

 

 

FIN